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La vision d'un europhile
15 novembre 2011

"La crise grecque : origines, remèdes et chances de redressement" par M. Georges Zavvos

photo-1"La crise grecque : origines, remèdes et chances de redressement" par M. Georges Zavvos, Ancien Membre du Parlement Européen, ancien Ambassadeur de la Commission européenne à Bratislava, Conseiller, Département juridique, Commission européenne.

Présentation 

Pays tout à fait particulier puisqu'il est à la base de la philosophie politique mais également très apprécié comme Etat-membre.  C'est également un pays qui est touché par la  crise financière et budgétaire.

Georges Zavvos a rejoint la Commission Européenne en 1982, juriste et spécialiste du droit des marchés financiers, du droit bancaire. Il a travaillé à la DG15 (aspects financiers de l'UE). Il est un des pères des directives bancaires. En 1990, il s'est laisser tenter par une carrière politique et est devenu membre du Parlement Européen. Le Premier Ministre grec de l'époque lui a demandé d'organiser une réforme du droit bancaire en Grèce. Cours à l'institut Solvay. Quatre ans plus tard, la Commission a fait appel à lui pour devenir représentant de la Commission à Bratislava où la démocratie était un peu malmenée. Il est l'un de ceux qui ont du annoncer en 1997 que  l'Union Européenne ne considérait pas la Slovaquie  comme digne d'être considérée comme candidat. Il a fallu attendre deux ans. Il a ensuite repris sa carrière à l'intérieur de la Commission où il appartient au service juridique.

 

"C'est un honneur d'être invité pour donner cette conférence et c'est un grand plaisir de rencontrer les professeurs et les étudiants mais également d'avoir un échange, une discussion sur des sujets brûlants. Je ne viens pas donner une conférence mais travailler sur des pistes de réflexions.

5 pistes de décisions qui se trouvent à l'épicentre d'un séisme mondial.

- Crise grecque d'un point vu historique

- d'un point de vue politique

- d'un point de vue économique

- d'un point de vue social

- Quelles leçons peut-on tirer du processus de l'intégration européenne avec ce qui se passe en Grèce?

Le point de vue historique

Crise grecque de deux points de vue: il faut voir son histoire récente avec l'indépendance en 1821 après quatre siècles d'occupation ottomane. La Grèce passe sous la tutelle de différentes puissances protectrices. Il y a aussi un contrôle financier international. En 1947, a lieu plan Marshall mais aussi la guerre civile jusqu'en 1949. Les historiens regardent énormement l'entrée de la Grèce dans la CEE en 1981. Dictature des colonels en 1967 et qui tomba en 1974. Vers 1976-1977, il y a eu une demande de la Grèce pour devenir membre et il y eu une sorte d'hésitations pour son entrée. Beaucoup de personnes disaient que la Grèce n'était pas tout à fait prête mais au vu de sa situation géopolitique, il était important pour les 9 pays membres de la CEE de prendre en considération sa candidature. En 1981, la Grèce rentre dans la CEE avec un changement de gouvernement en 1974 (gouvernement de centre-droit jusqu'à alors.) Andreas Papandréou devient Premier Ministre. Le Parti Socialiste venant au pouvoir change pas mal de chose et notamment le caractère anti-européen de son parti. 

 

Le point de vue  politique

L'origine de la crise actuelle grecque se trouve dans le dysfonctionnement de son système politique. La crise grecque n'est pas exogène, elle n'est pas venue qu'à cause de la crise financière et économique internationale mais il s'agit plutôt d'une crise indogène avec une crise de son système politique. Celui-ci était basé sur un système clientéliste. Système de promesses de recrutement et de distribution d'argent. Crise dans le système public où les fonctionnaires n'étaient pas recrutés pour leurs compétences mais du fait de leurs relations. En 1974, le nombre de fonctionnaires travaillant pour l'Etat grec était de 300 000. En 1989, il était de 693 000. Il fallait trouver de l'argent pour payer ces fonctionnaires. Il faut garder à l'esprit que ce système politique cliéntéliste se retrouvait dans les entreprises publiques. C'est un système où le Premier Ministre a pratiquement un pouvoir absolu avec un affaiblissement du pouvoir législatif et une nomination des juges par l'exécutif. Ce système où il n'y a pas d'équilibre des pouvoirs, ne donne aucun pouvoir au Président de la République. Cela explique le manque de solutions dans la crise actuelle. Pas de check and balances. Secteur public disproportionné avec une mauvaise performance (administration corrompue) notamment sur la levée de taxes. 

 

Le point de vue économique

La crise des dettes, dont celle de la Grèce, a éclairci que la Grèce a un système économique non soutenable. Il y a eu une croissance au début des années 2000 qui était basée entièrement sur la consommation publique et privée. C'est une situation chronique. Entre 2000 et 2008, 95% de la croissance cumulée du PIB provenait de la consommation. Cette économie s'est fortement règlementée avec des professions verrouillées (système d'offices). Le système fiscal omet de percevoir des revenus fiscaux. Selon l'OCDE pense il y a 15 à 20 milliards à récupérer (suffisant pour recouvrir les déficits existants). L'économie est donc alimentée entièrement par la consommation mais  il y a d'autres aspects à considérer: baisse des niveaux de consommation de 15 à 20%. Depuis les années 2000, les salaires grecs ont augmenté de 25% alors qu'en Allemagne les salaires ont été gelés.

En 2008-2009, le gouvernement de Papandréou est arrivé au pouvoir. Attente en Grèce d'un nouveau Premier Ministre et d'un gouvernement d'union nationale. Le déficit public n'était pas de 6% mais dépassait les 12,7% mais au bout de quelques mois on s'est rendu compte que cela tournait plutôt autour de 15%. Aucun politicien ne voulait l'admettre. Crise le 23 avril 2010 où Papandréou annonce que la dette grecque est de 350 milliards d'euros et demande l'aide de la troïka (FMI, BCE, UE). En 2011, nouveau plan d'austérité et en juillet, la zone euro trouve qu'il est nécessaire d'augmenter les prêts à la Grèce de 100 milliards. Création inter-étatique d'un fonds pour aider la Grèce mais aussi pour renforcer le système bancaire européen. Arrangement le 21 juillet 2011 au Conseil Européen pour permettre à la Grèce de rembourser sa dette à des conditions plus satisfaisantes. Les politiciens grecs contents décident de partir en vacances. Le 27 octobre, nouveau Conseil Européen qui trouve un nouveau plan de sauvetage: nouveaux prêts, réduction de la dette. Le 31 octobre, Georges Papandréou annonce un référendum qui fait exploser une crise européenne et internationale. Le 2 novembre, Merkel et Sarkozy mettent en suspend le référendum jusqu'à ce que le gouvernement grec accepte les conditions. Trinité sainte de la crise grecque: manque de compétitivité, dette et déficit. Dette du gouvernement central de 375 milliards, 40 autres milliards à payer aussi. Après le Conseil du 21 juillet, certains facteurs ont fait dérailler le programme:

-  pas de suivi du programme imposé (non augmentation des impôts)

- le nombre de fonctionnaire (entre 800 à 900 000 fonctionnaires) n'a pas diminué mais bien augmenté (plus de 24 000 fonctionnaires)

- Augmentation des prix au niveau international

La Grèce contrairement à l'Irlande n'a pas eu de problèmes dans son système financier et bancaire jusqu'en 2007. Cependant, vu la situation difficile de l'Etat grec, les banques grecques ont été obligées d'aller à la BCE pour emprunter de l'argent. La BCE a financé énormément d'obligations avec des liquités. Les banques grecques possèdent entre 49 à 50 milliards d'obligations de l'Etat grec. Si l'on a pas confiance das le système bancaire il y a un risque d'augmentation de retrait des dépôts: 255 milliards de dépôts et 80 milliards sont sortis de la Grèce. Rien que le mois dernie, 5 milliards sont partis.

 Les banques grecques doivent très vite retrouver des liquidités pour se renforcer. Le FESF a prévu pratiquement 20 milliards pour refinancer le système bancaire grec ainsi que 10 milliards de la part du FMI.

Certaines décisions ont été prises au Conseil Européen  pour attaquer 3 problèmes:

- Décision pour traiter le problème grec malgré sa petite taille économique est important systémiquement

- Prêt de 100 milliards d'euro et réduction de 50% de la dette grecque

- Renforcement du FESF qui avait été mis en place pour traiter les problèmes grecs mais par la suite irlandais, portuguais, ....

 

Peut-on sortir de la crise?

On assiste depuis 4 à 5 jours à une discussion des grands partis pour faire une grande coalition pour obtenir la 6ème tranche de 8 milliards d'euros de prêts. Aucun accord politique. Dysfonctionnement politique qui se trouve même à ses limites. Il faut vraiment faire un grand effort pour avoir une démocratie durable avec un meilleur équilibre des pouvoirs. Besoin de réformes de modernisation.

Il faut également une société civile. Tous les dyfonctionnements que l'on a vu, ont un lien avec l'attitude de la société civile qui accepte ce clientélisme. Il n'y a pas de contre-balance et pas de société civile capable de contrôler le système politique grec.

Possibilité de dévaluer la monnaie avec une monnaie nationale mais cela est impossible avec une monnaie intégrée. Beaucoup de professeurs proposent toute une série de mesures: forte dépréciation de l'euro pour arriver au niveau du dollard, réduction rapide des coûts salariaux et accélération des réformes (comme en Allemagne), déflation cumulative de 30%  pour obtenir une dévaluation interne. Il est très difficile de faire une approche allemande et d'arriver à une déflation du fait de l'explosion sociale. Des professeurs américains proposent la sortie de la zone euro pour dévaluer afin d'essayer de retrouver une compétitivité. Cependant cela est difficile car il faut d'abord voir l'environnement. La Grèce a un revenu par habitant de 28000 euros, la Turquie 10 000. La voie n'est pas forcément bonne.

Il existe une approche qui pourrait donner des résultats: il faut changement important du système politique, il faut traiter ce modèle économique monétaire sinon il n'y aura pas de sortie. De nombreuses entités publiques doivent fonctionner comme le système de préretraites. Des réformes structurelles doivent être faites, surtout en ouvrant certaines professions. De nombreux secteurs sont verouillés (pharmaciens, opticiens, dentistes, routiers, ...). Marché cartelisé et fermé aux importations.

Modélisation du système fiscal grec ; privatisation à effectuer car le secteur public est trop important ; bonne utlisation des fonds communautaire. La Grèce doit absorber 15 milliards inabsorbés pour les grands travaux. La Commission a créé une task force pour aider l'utilisation des fonds: les services publics défaillants ; impossibilité d'obtenir des ressources. Depuis 1982, la Grèce a obtenu en subside 250 milliards d'euros.

En 1981, la Grèce a rejoint la Communauté. Depuis les années 50-60, elle a fait des progrès remarquables dans le domaine économique. Expatriés grecs exceptionnels. Il faut tout de même souligner qu'il y a un certain type de faillite liée à l'Union Européenne:

- Faillite d'un système politique grec, en 1981-1982, le système politique grec trouve les subsides communautaires et ceux ci aident le dysfonctionnement du service public en redistribuant l'argent pour obtenir des votes.

- Faillite de l'Union Européenne: Il faut un contrôle strict lorsqu'il y a un tel transfert d'argent par les fonds de cohésion européene 

- Faillite des marchés: De 2000 à 2007, les grecs obtenaient des prêts comme si c'était des allemands alors qu'ils n'avaient pas la même solvabilié.

 

Quel type d'intégration européenne a-t-on besoin?

Système de Maastricht seulement basé sur le côté monétaire et l'on a bien compris qu'il faut un système de surveillance politique européen sur le système financier. Cela fait 22 ans depuis la chute du Mur de Berlin. On a célébré la victoire de la démocratie occidentale. Bouleversement hiérarchique des ordres géo-économiques. Enorme transfert de richesses vers les pays émergents qui déséqulibre l'ordre international. On a également un manque de gouvernance internationale. Dans ces situations se trouvent l'Europe. C'est quelque chose de très important mais incomplet. Nos institutions politiques sont la meilleure réponse face à la mondialisation.

Si l'Europe n'arrive pas à sortir de cette crise en renforçant ses structures, elle courra  à la fin. La crise a aussi des effets bénéiques et nous a appris à repenser les idéologies sur lesquelles nous nous sommes basées. Comment sortir de cette crise là? Comment renforcer l'Europe pour faire face à cette crise? Il n'y a pas de réponse en retournant aux nationalismes. Paul-Henri Spaak disait qu'en Europe il n'y avait pas de grands pays mais que certains pays ne le savent pas encore. Son message est plus important que jamais.”

Prochaine conférence de la Chaire Paul-Henri Spaak, mercredi 14 décembre, John Stevens, ancien membre du PE sur " L'attitude du Royaume-Uni à l'égard de l'Union Européenne.  

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